The WRITINGS of ISRAEL SHAMIR
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Le tsunami de la repentance

par Israël Shamir

26.01.2005

Traduit de l’anglais par Marcel Charbonnier

 

Israël est l’endroit idéal pour observer la vague géante de pénitence des Gentils : ce Jour du Souvenir d’Auschwitz qui dure au moins une semaine.

 

Bien sûr, comme une éclipse de lune, vous pouvez observer ce Canossa colossal : le monde entier, de l’Alaska à l’Antarctique, les Inuits et les Zoulous, les Cubains et les Mongols retiennent leur souffle, écoutent la prière juive et demandent la rémission de leurs péchés. Chirac a juré de se souvenir de ces juifs que la France n’a pas su sauver ; il a reconnu la faute de la France, chose que de Gaulle s’était bien gardé de faire. Le Chancelier allemand était encore plus contrit que jamais : il a une bonne raison : le monument de l’holocauste, d’une laideur indescriptible, zigzague le centre de Berlin – châtiment éternel. Souffletant les professeurs iconoclastes de l’Université Columbia, qui tentent de faire le distinguo entre les juifs et Israël, Ha-Tiqwa, l’hymne national israélien a retenti à l’ONU, lors d’une session exceptionnelle du souvenir.

 

Si vous pensez que la remémoration n’a rien à voir avec Israël : réfléchissez-y à deux fois. Ou, mieux : regarder comment Kofi Annan demande le pardon de ses péchés : il a viré Hansen, son représentant à Gaza, car celui-ci avait importuné Sharon ; il a juré de combattre l’antisémitisme jusqu’au dernier antisémite ; il a orchestré une session spéciale de l’Assemblée Générale de l’Organisation des Nations Unies, il a donné à Israël sa parole que les Nations Unies seront dorénavant plus attentifs au moindre de ses desiderata. A côté d’Annan, il y avait son épouse – nous avons appris qu’elle est une Wallenberg, et Raul Wallenberg était un Suédois de la famille royale, qui sauva de nombreux juifs, puis fut tué par les Russes. Il y a un autre Suédois, qui a sauvé de nombreux juifs, et qui a été tué par les juifs – Folke Bernadotte. Mais il est oublié, y compris à Stockholm, où un milliardaire juif vient d’acheter une nouvelle chaîne de télévision, afin de s’assurer de la pérennité de cette tendance à l’oubli sélectif.

 

Les gros titres des journaux israéliens posent la question : « Ont-ils retenu la leçon ? ». De qui s’agit-il ? Qui sont-ils, ces « ils » ? Et quelle leçon sont-« ils » censés avoir retenue ? Les juifs ont gagné la guerre : voilà quelle est la leçon administrée aux goyim, sous entendent-ils. Afin de faire passer cette leçon, pas moins de quarante millions d’hommes et de femmes ont été tués. Mais, de toute manière : on ne se souvient que des juifs ; ça valait donc le coup… Personne ne mentionne les soldats russes tués à Stalingrad, ni les civils allemands massacrés par Bomber Harris. Les Japonais carbonisés par la bombe A sont oubliés. Quant aux soldats américains, on parle tout au plus du Soldat Ryan. Mais lui, il a été sauvé…

 

Mais si le show se voit bien de partout, vous allez me demander pourquoi Israël est-il un balcon tellement formidable pour regarder Penitence Day ? Je vais vous le dire : il n’y a qu’en Israël que vous ne pourrez jamais vous bercer de l’illusion que « la leçon » porte sur le caractère inadmissible du racisme, de l’épuration ethnique ou de l’assassinat de sang-froid. Tout de suite après les infos, la Première chaîne israélienne [Channel One] a organisé une table ronde : que faire des goyim qui pensent que le commandement « Croissez et multipliez » s’adresse à eux, y compris ? Le plus grand danger pour Israël, a déclaré le chouchou des Américain, j’ai nommé Bibi Netanyahou, ce n’est pas les Palestiniens qui sont derrière le mur. Non : ce sont les Arabes israéliens. Ils se multiplient. Ils font venir leurs femmes et leurs maris des territoires occupés et de l’étranger – ce privilège doit être réservé aux seuls juifs !

 

Le chef du parti Shas, Eli Yeshai, a proposé de les exclure de la Sécurité sociale : afin qu’ils ne reçoivent plus aucune aide financière pour élever leurs enfants. Le Professeur Soffer fulmina : « La bombe démographique des non-juifs fait ‘tic-tac’ ! Il y en a trop. Ici, c’est un pays juif, le seul que nous ayons ! Les goyim, eux, ont des centaines de pays à leur disposition ! »

 

Il y a quelques Arabes, autour de la table ronde : un jeune étudiant, et un député à la Knesset. Ils tentent d’évoquer le problème du racisme, mais leur hébreu pourtant impeccable n’est pas entendu : le racisme, c’est quelque chose qui est fait aux juifs, ça ne peut pas être quelque chose qui émane des juifs, tout le monde sait ça ! Nous n’avons qu’un seul pays – Israël – et nous devons décider de ce que nous allons faire des autres, des non-juifs, afin qu’ils ne continuent pas à se multiplier comme ils le font.

 

Sur une autre chaîne, un speaker condamne les nationalistes russes : ils osent dire qu’ils n’ont qu’un seul pays et qu’ils ne veulent pas que leur pays soit diligenté par des juifs organisés. Ils ne forment pas le projet de limiter le taux d’accroissement démographique des juifs ; ils n’ont pas l’intention de les expulser. Non. Les nationalistes russes citent les lois infâmes du Shulkhan Aruch, un traité talmudique aujourd’hui traduit en russe afin d’endoctriner les juifs russes. Ils disent que ces préceptes encouragent à la haine anti-goyim chez les juifs. Ils veulent faire jouer les lois antiracistes contre les menées des fomenteurs de haine juifs. Ils disent que les organisations juives, en Russie, soutiennent ouvertement l’Etat raciste d’Israël. Si eux et leurs parents ont combattu l’Allemagne nazie, ce n’est pas au profit d’autres racistes, affirment-ils. Les organisations juives, en Russie, savent parfaitement pourquoi sont faites les lois antiracistes : ils exigent des tribunaux russes qu’ils fassent jeter les « racistes » en prison. Peut-être ces Russes sont-ils racistes ; peut-être ne le sont-ils pas. Mais ils ne sauraient être plus racistes que le Dr. Soffer, Bibi Netanyahou et Eli Yeshay !

 

La télévision donne une autre nouvelle : une fillette palestinienne de trois ans, Rahma Abu Shammas, a été tuée mercredi après-midi par l’armée israélienne, apportant ainsi sa contribution au règlement du problème posé par la menace démographique. La Cour suprême a décidé d’approuver la nomination du Général Dan Halutz au poste d’adjoint au chef de l’état-major de l’armée israélienne. Quand on demanda au commandant de l’aviation israélienne Dan Halutz quelle impression cela fait au pilote, lorsqu’il lâche une bombe d’une tonne sur un camp de réfugiés surpeuplé de Gaza, tuant quinze enfants, il a répondu : « Une petite secousse. Je dors comme un bébé, vous savez ! ». Les juges lui quand même conseillé d’être un peu plus précautionneux, lorsqu’il accordera une interview, à l’avenir…

 

Le Premier ministre Ariel Sharon a déclaré mercredi dernier que le monde « n’a pas bougé le petit doigt pour arrêter l’Holocauste ». Que voici une information intéressante : je ne savais pas que l’Allemagne nazie avait été arrêtée par « Tsahal » ? Mais, il faut bien le reconnaître, la mort de millions de soldats russes et de milliers de soldats britanniques et américains n’équivaut en rien au fait de « lever le petit doigt »… Cette déclaration de Sharon fut une insulte ouverte et effrontée envers les vétérans de la guerre ; ce fut une insulte aux familles des soldats tombés au champ d’honneur ; ce fut une insulte à la Russie, à l’Angleterre et à l’Amérique.

 

Mais tous ces pays ont bien appris leur leçon, aussi sont-ils restés sagement agenouillés.

 

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