La Troisième Force
par Israel Shamir
3 septembre 2007-09-03
on
www.israelshamir.net
traduit de l’anglais par Marcel Charbonnier
[C’est le moment de nous redresser sur
nos sièges et de prêter attention à ce héros de la culture en
émergence qu’est Arcadi Gaydamak, ce Ross Perot israélien. Il a
du cran, il est plein de bonne volonté et de compassion. Certes,
les candidats de la troisième force sont généralement plutôt
imprévisibles, mais on connaît la valeur des candidats
consensuels : elle est nulle. Avec lui, Jérusalem en tant que
Ville Unique peut devenir un modèle pour un Etat Unique. Mais
cela dépend, dans une large mesur,e des Jérusalémites
palestiniens. Israel Shamir]
« Afin de réduire les dépenses d’énergie, le
gouvernement a éteint la lumière, au bout du tunnel »,
plaisantent les Israéliens. Le déjà-vu [en français dans le
texte, ndt] est descendu sur la scène politique, la rendant
tellement sombre que même un chat aurait besoin d’une lampe
torche pour s’y promener. Des politiciens à la date de
péremption dépassée et rejetés, tels Barak et Netanyahu,
reviennent subrepticement au pouvoir, tandis qu’Ehud Olmert
attend son tour d’être rejeté, après quoi il sera, lui aussi,
recyclé.
C’est en cet instant de basses eaux qu’une forte
personnalité, une personnalité nouvelle, est en train d’absorber
le plus gros des feux évanescents de la rampe. Impossible
d’ouvrir un canard israélien sans y lire son nom ; son visage
vous scrute, depuis les affiches placardées dans les rues. Toute
conversation, toute session de questions au Parlement, et tout
débat télévisé vous le ramènent. J’ai nommé Arcadi Gaydamak,
l’homme qui veut sauver Israël.
C’est un Ross Perot israélien. Petit rappel,
pour les plus jeunes : Ross Perot, fils d’un modeste ramasseur
de coton, avait « réussi » dans le business des données
économiques, était devenu millionnaire et avait tenté de sauver
les Etats-Unis en se présentant aux élections présidentielles
dans ce pays. Rétrospectivement, c’est dommage qu’il n’ait pas
gagné : Perot était en effet un patriote américain de tendance
conservatrice-isolationniste modérée ; il était en faveur d’un
enseignement de qualité, de la réhabilitation des villes
américaines, contre les aventures militaires au Moyen-Orient et
les délocalisations. Les démocrates et les républicains
s’unirent pour l’enterrer, après quoi ils déferlèrent sur Bagdad
en s’essuyant les pieds, au passage, sur son cadavre
[politique].
Gaydamak parle souvent comme lui ; quand il s’en
prend aux politiciens professionnels israéliens, leur reprochant
leur corruption et leur absence d’empathie envers les citoyens
ordinaires, et son message est reçu 5/5 – c’est à juste titre
que les Israéliens tiennent leurs hommes politiques en piètre
estime. Les politiciens lui revalent ça, sous la forme d’une
hostilité sans mélange : il réussit, en effet, à unifier la
droite et la gauche israélienne au moins autant qu’avait pu le
faire la guerre contre le Liban. Les magnats, les Maîtres du
Discours Israélien, le haïssent encore plus qu’eux, car ce n’est
pas eux qui l’ont créé. Les journalistes et les reporters sont
invariablement hostiles et carrément impolis avec lui, ne lui
épargnant aucune accusation ni aucune insinuation. Mais il est
extrêmement populaire chez hoi polloi [la masse des
citoyens, en grec, ndt], auprès du vieux Yishuv pré-sioniste,
c’est-à-dire chez les juifs séfarades et chez les familles
juives orthodoxes déshéritées de Jérusalem, chez les communautés
immigrées hors-élite – les Marocains et les Russes – ainsi que
chez les Palestiniens de la Galilée. Ils aiment son panache, ils
aiment sa générosité et sa compassion, ils aiment son discours
direct. Mais ils l’aiment, avant tout, parce qu’il sponsorise
des équipes de foot : le Beitar (séfarade) de Jérusalem et
l’équipe arabe de Sakhnine [une ville de Galilée]
Son nouveau parti, Justice Sociale, est une
nouvelle Troisième Force, potentiellement puissante, dans la
structure politique israélienne. Les électeurs israéliens sont
en général mécontents des partis politiques existants (ne le
sommes-nous pas, nous tous ?), mais (par opposition à ce qui se
passe en Angleterre et aux Etats-Unis) le système électoral
israélien permet que l’insatisfaction soit exprimée dans l’urne
électorale. Ainsi, un parti de troisième force mit un terme à la
longue domination du parti travailliste, en 1977, et, tout
récemment, un Parti des Retraités a fait, lui aussi, une percée
considérable. Même le parti Kadima au pouvoir est un parti de
« troisième force », se positionnant entre le parti travailliste
et le Likoud. Aussi est-il tout à fait possible que M. Gaydamak
trouve à l’avenir une place éminente au sommet, que ce soit au
gouvernement, ou – comme il dit – à la barre de Jérusalem, où il
est extrêmement populaire. Jérusalem pourrait bien être le point
de départ de son ascension vers le poste de Premier ministre –
Ehud Olmert était d’ailleurs maire de Jérusalem, avant de
devenir Premier ministre d’Israël. Le moment est venu de nous
redresser sur nos sièges et de prêter attention à l’ascension de
M. Gaydamak, car c’est l’homme qui pourrait éventuellement en
finir avec l’impasse actuelle. Il a du cran, il a de la bonne
volonté et de la compassion, là encore, comme Perot. Certes, les
candidats de la troisième voie sont plutôt imprévisibles. Mais
on connaît la valeur des candidats consensuels : elle est
nulle !
Les partis en compétition, de gauche et de
droite, travaillent d’arrache-pied à saper sa légitimité : ça
n’est pas quelqu’un de facile-facile à contrôler ; il a un
esprit indépendant, et il n’est pas susceptible d’être acheté.
La droite dit qu’il est un « Arab-lover » (une accusation
similaire à celle de « nigger-lover », dans le Sud profond des
Etats-Unis) ou un espion russe, envoyé par Poutine, quant à la
gauche… Eh bien, la gauche israélienne, il faut le savoir, est
un groupe aristocratique élitiste, comme les Filles de la
Révolution Américaine, et ses caciques sont toujours prêts à
suriner quiconque n’aurait pas navigué sur le Mayflower
sioniste. Le politicien de gauche Ran Cohen – un colonel – a
déposé une loi contre Gaydamak, qui a bien failli bannir
celui-ci, personnellement : il était opposé à ce qu’un homme
utilise son fric directement, au lieu de le faire via un homme
politique servile. Gaydamak a retourné la situation en sa
faveur : il a accusé Olmert d’avoir déclenché la guerre contre
le Liban à seule fin d’améliorer ses sondages calamiteux. Bien
que vous puissiez lire des choses à ce sujet dans Counterpunch,
vous n’entendrez que très rarement exprimer ce genre d’opinion
en Israël.
L’origine de notre homme fournit la clé tant de
l’hostilité de l’élite à son endroit que de sa popularité auprès
des masses. Gaydamak est venu en Israël en 1972, immigrant russe
sans le sou, qui pouvait tout au plus espérer décrocher un job
temporaire de énième catégorie. Israël, pays en plein marasme et
soumis aux restrictions, n’était pas l’endroit idéal pour un
homme prêt à en découdre, et le dynamique jeune homme de vingt
ans reboucla donc ses valises, et partit pour la France. Après
moult aventures couronnées d’une Légion d’Honneur faisant foi,
il a « réussi » ; il est devenu milliardaire, il est retourné
pour quelque temps dans sa Moscou natale. Puis, deux ans après,
il est revenu en Israël.
En Israël, ce fut la tornade blanche. Tout
d’abord, nous vîmes en lui un gars du coin, qui avait réussi son
coup ailleurs, et qui revenait en Israël pour y rouler les
mécaniques. Une sorte de Great Gatsby à l’israélienne. Tiré à
quatre épingles, svelte, rapide comme un tennisman, il s’établit
à Césarée, un quartier résidentiel et balnéaire peuplé de riches
aristocrates, à mi-chemin entre Tel Aviv et Haïfa, il a organisé
un tas de réceptions somptueuses, soutenant généreusement de
nobles causes.
Mais Israël n’a rien des Etats-Unis à l’époque
de Scott Fitzgerald ; sous des manières démocratiques et
sans-façon, c’est l’ordre strict, autoritaire, d’une société
tribale particulièrement primitive qui règne dans ce pays. Tant
que vous n’avez pas un tas de scalps d’Arabes sous votre
ceinture, vous n’êtes personne ; même chose, si votre pôpa n’a
pas fait son service au Palmach ou dans l’Irgoun, ces bandes
armées de la guérilla sioniste d’avant 1948. Un gentleman
fortuné avec une touche de philanthropie, c’est en Angleterre,
qu’il doit aller se faire adouber Lord, pas en Israël ; Gaydamak
fut aussi rejeté par l’élite sociale israélienne qu’un
cul-terreux américain dans un roman d’Henry James. Il finit par
se faire admettre, mais son expérience, hautement traumatisante,
a probablement influencé son évolution ultérieure :
Il n’a pas suivi le parcours d’autres juifs
opulents, qui viennent souvent en Israël, voire même s’y
installent – il n’était pas satisfait de sa vie de nabab sur la
côte, de se retrouver en compagnie du Premier ministre, de
visiter des colonies et des bases militaires, de couper de
rubans et de donner son nom à des buildings, même s’il a fait
tout ça. Il a découvert que la société israélienne est malade,
et il a commencé à dire ce qu’il avait sur le cœur, et à agir
d’une manière tout à fait inhabituelle.
Alors que les personnalités publiques
israéliennes et les hommes d’affaires juifs en visite en Israël
se livrent habituellement à une surenchère férocement chauvine,
Gaydamak, lui, a adopté un ton très différent : il en a appelé à
l’égalité et à la prospérité pour tous les citoyens, qu’ils
soient juifs ou Arabes. Il a dit que la solution réside dans la
prospérité à la fois pour les Israéliens et les Palestiniens. En
même temps, il se considère comme un juif croyant et pieux, et
il fait souvent référence à la morale juive. Apparemment,
Gaydamak a une lecture peu habituelle, mais tout aussi
recevable, de la tradition juive. Dans une interview à Time
magazine, il déclarait :
« Je crois fortement en une possibilité de paix.
Certains ont mal compris mes références à la tradition juive, y
voyant quelque mot de passe, quelque shibboleth nationaliste,
quelque désir d’exclure les Arabes ou de les marginaliser. Il
est impossible, pour les juifs, d’être heureux et satisfait,
aussi longtemps que leurs voisins souffrent. Nous ne devrions
pas pousser la population arabe entre les bras des extrémistes.
A mon avis, c’est le niveau de vie des Palestiniens qu’il
convient d’améliorer. Cela ne doit pas être fait sur le dos du
contribuable israélien : les Palestiniens sont tout à fait
capable de s’en sortir, pour peu qu’on cesse de faire obstacle à
leur développement. »
Pour avoir dit cela, il a été accusé par les
médias nationalistes d’avoir avoué que c’est bien Israël qui
fait obstacle au développement des territoires palestiniens.
Bien que l’armée israélienne étouffe toute activité dans les
territoires occupés au moyen de blocs de ciments en travers des
routes et d’autres barrages, ce fait est généralement nié par
les officiels israéliens.
Moins commune fut, en revanche, sa compassion de
Gaydamak pour le simple citoyen israélien. Durant la guerre du
Liban, l’été dernier, époque où la gauche et la droite
israéliennes parlaient de ratatiner le voisin du Nord, Gaydamak
s’est préoccupé des nécessiteux : il a organisé – à ses frais –
des camps de vacance pour des milliers d’habitants de la
Galilée, qui préférèrent rester à l’écart d’une pluie mortelle
de missiles. Il fut accusé de comportement antisioniste par les
médias : un bon sioniste, expliquèrent ceux-ci, devrait plutôt
préférer mourir que battre en retraite. Mais les citoyens
ordinaires de la Galilée lui furent reconnaissants, car ils
n’avaient nullement l’intention de mourir pour une question de
« principes ».
Au sujet de la confrontation avec le Hamas, il
adopta aussi une position inhabituelle. Alors que les hommes
politiques israéliens exigeaient que l’on réduisît Gaza à l’état
de ruines, Gaydamak s’occupa des habitants miséreux de Sderot,
une petite ville frontalière que le Hamas bombardait. Il envoya
des bus, et il emmena les habitants de Sderot qui le désiraient
se reposer dans la luxurieuse villégiature qu’est Eilat. Cela
mit Olmert en rage contre lui : Olmert, ainsi que les ministres,
préfère récolter les bénéfices politiques de la souffrance
d’Israéliens ordinaires. Gaydamak fut accusé de faire sa B.A. à
seule fin de s’attirer les bonnes grâces du peuple ; mais les
gens étaient très heureux de voir que quelqu’un, malgré tout,
s’occupait d’eux.
Si Gaydamak fait peur à l’establishment
israélien, c’est parce qu’il s’efforce de casser la baraque de
la politique israélienne. Dans ces cas-là, dès lors qu’un
outsider devient par trop visible, les chefs envoient la police.
C’est ce qui s’était déjà passé avec l’éminent dirigeant
séfarade Aryé Deri : la police a été sur ses trousses durant dix
ans, jusqu’à ce qu’ils aient réussi à monter de bric et de broc
un procès contre lui, et qu’ils l’aient mis en taule. D’autres
leaders séfarades- le général Mordechaï (qui s’était
dangereusement approché du fauteuil de Premier ministre) et
l’ex-président Katzav – avaient été mis en disgrâce, eux aussi,
par des moyens plus ou moins nets. Ce serait une erreur, que de
croire que le système juridique puisse être à la fois malhonnête
pour les Arabes, et honnête avec les juifs ! Même si cela a été
le cas une fois ou deux, le système n’en demeure pas moins
fondamentalement malhonnête. Les juges qui justifient les
assassins juifs d’Arabes sont parfaitement capables de faire
mettre en prison un juif considéré dangereux pour le régime.
Reste que les accusations contre Gaydamak ne tiennent pas
debout. Mais le système ne lâche pas le morceau…
Une campagne fait rage contre lui, dans les
médias, d’un genre particulièrement odieux. S’il est russe,
disent-ils, alors, c’est assurément un agent du KGB. S’il est
riche, alors, c’est sûrement un escroc ! S’il se trouve en
Israël, c’est certainement qu’il a besoin de se réfugier quelque
part ! Mais ce n’est pas quelqu’un de fragile, ce Monsieur
Gaydamak ! J’ai eu le réel plaisir de le voir, voici quelque
temps de cela, à la télévision
[http://www.keshet-tv.com/VideoPage.aspx?MediaID=20064&CatID=345
].
Il avait été invité à cette émission exactement
comme on invite un taureau à une corrida ; mais ce furent les
matadors qui finirent évacués de l’arène, étendus sur des
civières. Depuis que Galloway a envoyé chier un journaliste de
la chaîne SkyNews hyper-remonté contre lui
[http://news.sky.com/skynews/video/videoplayer/0,,31200-galloway_060806,00.html
], je n’avais plus vu une telle capacité à repousser une attaque
en règle sur les ondes. Face à lui, il y avait l’infâme Matti
Golan, ancien rédacteur en chef du Ha’aretz, qui s’illustra
jadis en déclarant qu’il haïssait tous les Allemands, sans
distinction. Il s’est avéré qu’il hait tous les Russes, aussi.
Il se demandait, plein d’aigreur, pour quelle raison y avait-il
quelqu’un pour s’intéresser à ce Gaydamak, dès lors que celui-ci
n’appartient pas au Sel de la Terre (car telle est l’appellation
que se donnent les Israéliens certifiés !)
Cette curée médiatique fut plutôt
contreproductive, car elle fit de Gaydamak un ‘underdog’, un
chien dominé, ce qui lui attira énormément de sympathie. « C’est
un criminel, non ? » s’évertuait à demander un reporter, auquel
il était répondu : « Non ; nous ne le pensons pas ! ». De fait,
beaucoup d’accusations pèsent sur Gaydama ; toutefois aucune n’a
reçu confirmation. Pour nous, aucune n’a d’ailleurs la moindre
importance. On l’accuse d’armer le gouvernement légal de
l’Angola, en lutte contre Savimbi, l’homme de la CIA, et son
Unita, armée par l’Afrique du Sud. Gaydamak nie ; mais même si
c’était vrai, je considère que ce serait une bonne action.
Savimbi était un type horrible, violant en permanence les
accords de pays et plongeant l’Angola dans un bain de sang. On
accuse Gaydamak de faire preuve de générosité et de charité à
des fins politiques ; mais on peut en dire autant de la plupart
des philanthropes. On l’accuse de garder son argent à l’abri des
mains chapardeuses de la justice israélienne, mais ce n’est là
qu’élémentaire prudence…
Pendant ce temps-là, il continue à prodiguer sa
charité. Il a donné un hôpital aux juifs religieux dans la
nécessité. Son capital politique ne cesse de s’accroître. Il
vient de tourner une pub pour une compagnie de téléphones
mobiles, où il est campé un sioniste socialiste russe, qui fonda
le mouvement kibboutzique, voici de cela un siècle. Dans ce
clip, il se débarrasse de ses costumes élégants, et il rejoint
la classe laborieuse. Avec ce clip, il est devenu un véritable
Héros de la Culture. « C’est indigne ! Jamais Netanyahu n’aurait
fait une chose pareille ! », s’étranglèrent les médias. [
http://news.nana10.co.il/Article/?ArticleID=510986&TypeID=1&sid=126].
Et Gaydamak de rétorquer : « Je suis Monsieur Tout-Le-Monde ; je
suis l’homme de la rue » !
Gaydamak est probablement, aujourd’hui, la
personnalité israélienne la plus populaire à avoir des opinions
humaines. Il veut amener au pouvoir la coalition des sans
pouvoir : les séfarades, les Russes, les Palestiniens, les
ouvriers, les juifs religieux, toute la masse des hoi polloi,
des plébéiens. Personne n’a réussi jusqu’ici à lui extorquer une
dénonciation des Arabes, ni son soutien à une attaque contre les
Palestiniens, bien que cela soit considéré comme ‘de rigueur’
chez les gens comme il faut, en Israël. Il est aux antipodes de
Lieberman, un autre politicien russe, qui s’est fait un nom
‘grâce’ à son nationalisme outrancier. Gaydamak est aussi une
brebis galeuse, aux yeux des oligarques russes (oups : juifs
russes), étant donné qu’il conserve ses bases à Moscou, mais
sans combattre Poutine, comme le font Nevzlin et Berezovsky.
Enfin, il veut sauver Israël ; il l’a déclaré, à la télévision.
Dieu sait, Israël a peut-être besoin que quelqu’un le sauve de
sa déréliction ?
Un sauveur improbable, ce fédérateur des
sans-le-sou roulant en Cadillac ? A y repenser, un pauvre ne
serait pas en mesure de se faire entendre. Il est plus facile, à
un chameau, de se faufiler à travers le chas d’une aiguille…
Mais qui a besoin qu’un chameau aplati ? C’est plus difficile,
pour un riche, mais cela reste possible. A mes yeux, la richesse
n’est pas un péché capital et irrémissible.
Sa décision de se porter candidat à la mairie de
Jérusalem nous donne une chance de tenter l’instauration du
modèle d’Etat Unique dans notre Cité Unique. Nos bons amis Noam
Chomsky et Michael Neumann font la promo de la « solution » à
deux Etats, tandis que nos amis qui sont de notre côté, Virginia
Tilley, Roger Tucker et encore bien d’autres, parlent d’un Seul
Etat – mais probablement ni les uns ni les autres n’ont compris
que ce n’est là en rien une simple question théorique. La
population de Jérusalem inclut entre 30 et 40 % de Palestiniens
susceptibles de participer aux élections municipales. Ils sont
susceptibles de voter, mais ils ne le font pas : on leur a
raconté qu’il allait y avoir Deux Etats, et que Jérusalem Est
ferait partie intégrante de la ‘Palestine’… Alors ils ont
attendu, patiemment, pendant quarante ans. Et, pendant ce temps,
Jérusalem devenait de moins en moins hospitalière pour eux. Les
Palestiniens auraient un moyen de se défendre : participer aux
élections municipales, et voter. Mais ils n’utilisent pas ce
moyen, au grand soulagement des extrémistes juifs.
Voici, de cela, quelques années, au cours des
dernières élections, j’ai parlé avec plusieurs Jérusalémites
éminents au sujet de leur participation ; mais aucun d’entre eux
n’osa casser le moule. Ils ne croyaient pas qu’ils étaient en
mesure de changer les choses, et ils continuaient à espérer que
l’Autorité Nationale Palestinienne les mènerait à la liberté.
Peut-être qu’aujourd’hui, maintenant que Mahmoud Abbas a tourné
casaque et a fait de l’Autorité Palestinienne une branche de la
sécurité israélienne, comprendront-ils leur erreur et
voteront-ils massivement ? Ils sont en mesure de former un tiers
du conseil municipal, tandis qu’un deuxième tiers serait
constitué par les séfarades pauvres et les juifs religieux.
En la personne de Gaydamak, les Palestiniens ont
une occasion de provoquer un changement cosmique et de conquérir
la ville – non pas seulement pour eux-mêmes, mais également pour
eux-mêmes. Gaydamak n’est pas un révolutionnaire. Il n’est pas
même un radical. Mais cet homme plutôt conservateur a une idée
positive de l’égalité et du fair-play, il a le sens des affaires
et des capacités organisationnelles hors du commun. Ayant été
formé en Union soviétique, il n’a aucun préjugé raciste, ni
aucun préjugé religieux. Avec lui, les Palestiniens peuvent
mettre à la retraite le bon Jeff Halper, et rendre inutile son
Comité Contre les Démolitions de Maisons [ICAHD : Israeli
Committee Against House Demolitions]. Sans lui, ils sont
condamnés à souffrir.
Cet homme nous offre vraisemblablement la
meilleure chance d’un changement vers une vie prospère et
paisible dans une Ville Unie, et cette chance est susceptible de
nous conduire à un Unique Etat.
Ne la gaspillons pas !
°°°°°°°°°
The Third Force
By Israel Shamir
www.israelshamir.net
03.09.2007
This is right time to sit up and pay attention
to the new rising culture hero, Arcadi Gaydamak, an Israeli Ross
Perot. He has guts and he has good will and compassion. True,
Third Force candidates are rather unpredictable, but the
mainstream candidates are a sure thing – worthless. With him,
Jerusalem as One City can become a model for One State: but much
depends on the Palestinian Jerusalemites. [IAS]
In order to cut energy costs, the government
turned out the light at the end of tunnel, say the Israelis.
Déjà-vu descended on the political scene, making it so dark that
a cat needs a torch to get around. Shop-soiled once-rejected
politicians Barak and Netanyahu creep back to power, while Ehud
Olmert waits for his turn to be rejected and re-cycled later.
At this low point, a powerful new personality is
soaking up much of the waning limelight. You can't open an
Israeli newspaper without reading his name; his face looks at
you from posters on the streets; every conversation, every
Parliamentary hearing or TV debate brings you the man. He is
Arcadi Gaydamak, the man who wants to save Israel.
He is an Israeli Ross Perot. A reminder for
young people: Ross Perot was the son of a Texas cotton-picker,
who "made it" in the data business, became a billionaire and
tried to save the US by running for the presidency. In hindsight,
it is pity he did not win: Perot was an American patriot of a
soft conservative-isolationist ilk; he was for quality education,
repairing US cities, against Middle East military adventures and
outsourcing. Democrats and Republicans united to bury him and
marched to Iraq over his [politically] dead body.
Gaydamak often sounds like Perot, when he
attacks Israeli professional politicians for their corruption
and lack of concern for ordinary people, and his message is well
received – Israelis justifiably hold their politicians in low
esteem. The politicians repay him with unmitigated hostility: he
succeeds in uniting the Israeli right- and left-wing just as did
the Lebanese war. The pundits, the Masters of Israeli Discourse,
hate him even more, for he was not created by them. The
journalists and reporters are invariably hostile and outright
rude to him, never sparing an accusation or innuendo. But he is
extremely popular with the hoi polloi, with the pre-Zionist Old
Yeshuv, that is, with Sephardi Jews and the poor Jewish Orthodox
families of Jerusalem, with non-elite immigrant communities –
Moroccans and Russians, and with the Palestinians of Galilee.
They like him for his panache, for his generosity and
compassion, for his straight talk, but first of all for his
sponsorship of soccer teams, of the Jerusalem Sephardi Beitar
and of the Galilean Arab Sakhnin.
His new party called Social Justice is a new and
potentially powerful Third Force in the Israeli political
structure. Israeli voters are usually dissatisfied with existing
parties (aren't we all?), but (as opposed to the UK and the US)
the Israeli election system allows for this dissatisfaction to
be expressed in the voting booth. Thus, a third force party
broke the long Labour Party rule in 1977, and quite recently a
Retirees Party also made considerable inroads. Even the ruling
Kadima party is a "third force", positioned between the Labour
and Likud. Thus it is quite possible that Mr Gaydamak will find
a prominent place at the top, whether in the government or – as
he says – at the helm of Jerusalem, where he is extremely
popular. Jerusalem could be the starting point for his rise to
the PrimeMinistership – Ehud Olmert was mayor of Jerusalem to
start with. This is right time to sit up and pay attention to
the rising Mr Gaydamak, for he is the man who could break the
present impasse. He has guts and he has good will and
compassion, again like Perot. True, Third Force candidates are
rather unpredictable, but the mainstream candidates are a sure
thing -- worthless!
Competing parties of the left and right work
hard to undermine his legitimacy: he is not an easy man to
control; he has an independent mind and he can't be bought. The
right says that he is an Arab-lover (an accusation similar to 'nigger-lover'
of the Deep South) or a Russian spy sent by Putin, the left…
Well, the Israeli left is an aristocratic elitist body like the
Daughters of the American Revolution, and they are always ready
to knife anybody who did not sail with the Zionist Mayflower.
Left-wing politician Colonel Ran Cohen introduced a bill against
Gaydamak, which stopped just short of banning him personally: he
objected to a man using his money directly instead of doing it
via an obedient politician. Gaydamak returns the fight: he
accused Olmert of starting the Lebanon War in order to improve
his falling ratings. Though you can read of that in Counterpunch,
you rarely hear such views being expressed in Israel.
The man's origins provide a key to both the
elite hostility and the mass popularity. Gaydamak came to Israel
in 1972 as an impecunious Russian immigrant who could only hope
for low-end temporary jobs. Stagnate and restrictive Israel was
not the place for a man on the go, and the dynamic 20-year old
moved on to France. After many adventures capped with a Légion
d'honneur ribbon as proof, he "made it", became a billionaire,
returned for a while to his native Moscow, and some two years
ago came back to Israel.
He took Israel by storm. At first, we saw him as
a local boy who made it good elsewhere and came back to show
off. An Israeli Great Gatsby, of sorts. Wonderfully dressed,
lithe, fast as a tennis player, he established himself in
Caesarea, a villa beach community of wealthy aristocrats halfway
between Tel Aviv and Haifa, threw a lot of lavish receptions,
and generously supported worthy causes.
But Israel is not the US of Scott Fitzgerald
days; under its easy-going democratic ways there is the strict
authoritarian pecking order of a more primitive tribal society.
You are nobody unless you have a lot of Arab scalps under your
belt; you are nobody if your father did not serve in Palmach or
Irgun, the Zionist guerrilla bands of pre-1948. An impeccable
wealthy gentleman with a philanthropic touch would be knighted
in modern England; Gaydamak was as soundly rejected by the
Israeli upper class as an American upstart in Henry James'
novels. Eventually he got in, but this traumatic experience
probably influenced his next steps:
He did not follow the route of other wealthy
Jews who often visit or even settle in Israel -- he was not
satisfied with his comfortable life at the Mediterranean Sea,
with rubbing shoulders in the company of Prime Minister, with
visiting settlements and military bases, with cutting ribbons
and naming buildings after himself, though he did all that. He
discovered the illness of Israeli society and began to speak his
mind and act, and to act in quite unusual manner.
While Israeli public figures and visiting Jewish
businessmen usually compete in ferociously chauvinist rhetoric,
Gaydamak struck a completely different tone: he called for
equality and prosperity for all citizens, Jews and Arabs alike.
He said that the solution lies in achieving prosperity for both
Israelis and Palestinians. At the same time, he considers
himself a believing and pious Jew, and often refers to Jewish
ethics. Apparently Gaydamak has an unusual, but also possible
reading of Jewish tradition. In an interview to the Time
magazine he said:
"I am a great believer in possibility of peace.
Some people misunderstood my reference to Jewish tradition as a
nationalist shibboleth, as a desire to exclude and marginalize
Arabs. Nothing could be further from truth. I believe in
humanism of Jewish tradition. It is impossible for Jews to be
happy and content as long as their neighbours suffer. We should
not push the Arab population to be under the extremist
influence. In my view, it is the Palestinian living standards
that should be increased. It does not have to be done at the
Israeli taxpayer's expense: the Palestinians are able to cope if
we don't block their development."
For these words, he was accused by nationalist
media for admitting that Israel blocks the development of
Palestinian territories. Though Israeli army strangulates all
activity in the occupied territories by means of roadblocks and
other blockades, this is usually denied by Israeli officials.
More uncommon is his compassion for the ordinary
Israeli. During the Lebanon War last summer, when the Israeli
left and right spoke of beating the hell out of the Northern
neighbour, Gaydamak attended to the needy ones: he organized and
paid for a summer camp for thousands of Galilee residents who
preferred to stay far away from the deadly missile rain. He was
accused by media of anti-Zionist behaviour: a good Zionist, they
say, should rather die than retreat. But the ordinary people of
Galilee were grateful, because they had no intention of dying in
order to make a point.
In the confrontation with Hamas, he also took an
unusual line. While Israeli politicians demanded the ruin of
Gaza, Gaydamak took care of poor residents of Sderot, a small
border town bombed by Hamas. He sent coaches and ferried the
inhabitants to take a rest in the luxurious resort of Eilat.
This made Olmert mad at him: Olmert, and the government, prefers
to reap political benefits from the suffering of ordinary
Israelis. Gaydamak was accused of doing his good deeds in order
to ingratiate himself with the people; but the people were happy
that somebody cared for them.
The Israeli establishment fears him because he
is trying to upset the apple cart of Israeli politics. In such
cases, whenever an outsider becomes too visible, the bosses send
for the police. This was the case with prominent Sephardi leader
Arye Deri: police followed him for ten years, until they
succeeded in patching together a case against him and putting
him in jail. Other Sephardi leaders: General Mordecai (who was
dangerously close to the PM seat) and ex-President Katzav were
also disgraced by means fair and foul. It is a mistake to
believe that the legal system can be dishonest for Arabs and
honest for Jews: if it was permitted once, the system stays
dishonest. The judges who justify Jewish killers of Arabs are
perfectly able to imprison a Jew who is considered dangerous for
the regime. Meanwhile, accusations against Gaydamak do not
stick, but the system does not relent.
There is a media campaign against him, of rather
crude kind. If he is Russian, they say, he's got to be a KGB
agent. If he is wealthy he's got to be crook. If he is in Israel,
he's got to be in need of refuge. But he is not fragile, this Mr
Gaydamak. I had the real pleasure of watching him some time ago
on TV <http://www.keshet-tv.com/VideoPage.aspx?MediaID=20064&CatID=345>
: he was invited to appear on a show the same way a bull is
invited to a bullfight; but it was the matadors who were carried
out from the arena on stretchers. Since Galloway's fighting of a
hostile reporter <http://news.sky.com/skynews/video/videoplayer/0,,31200-galloway_060806,00.html>
from SkyNews, I have not witnessed such ability to withstand an
attack on the air. The man on the other side was the infamous
Matti Golan, ex-chief editor of Haaretz, who said once that he
hates all Germans. It turned out he hates all Russians as well.
He was complaining about why anybody would attention to Gaydamak
at all, as he does not belong to the Salt of the Earth (this is
the appellation for real true-blue Israelis).
This media onslaught was rather
counterproductive for it made him an underdog and brought him
much sympathy. "He is a criminal!" a reporter would ask the
public, and will get "We do not think so" in response. Indeed,
there are many accusations against Gaydamak, though none is
confirmed. For us, none is relevant. They accuse him of arming
the legitimate government of Angola in its fight against CIA man
Savimbi and his South Africa-armed Unita. Gaydamak denies it;
but even if it were true, this qualifies as a good deed in my
book. Savimbi was a horrible creature, always reneging on peace
settlements and bloodying Angola. They accuse Gaydamak of being
charitable for political purposes; but that can be said about
any philanthropist. They accuse him of keeping his money outside
of the grasping hands of Israeli justice, but this is just
prudence.
Meanwhile, he continues to spread his charity.
He provided the poor religious Jews with a hospital. His
political capital grows. Now he starred in a commercial of a
mobile telephone company, being modelled on a socialist Russian
Zionist who founded the kibbutz movement a hundred years ago. In
the clip, he drops his elegant attire and joins the working
masses. With this clip, he rose to the status of Culture Hero.
"This is undignified! Netanyahu would never do it!" – insisted
media <http://news.nana10.co.il/Article/?ArticleID=510986&TypeID=1&sid=126>
. "I am the man in the street", he retorted.
Gaydamak is probably today the most popular
Israeli personality with humane views. He speaks of bringing to
power the coalition of the powerless: Sephardis, Russians,
Palestinians, workers, religious Jews, the whole hog of hoi
polloi. Nobody has yet succeeded in squeezing from him a
denunciation of Arabs, or support for an attack on Palestinians,
though it is considered to be de rigueur in the polite society
of Israel. He is an opposite to Lieberman, another Russian
politician, who made his name by extreme nationalist slogans. He
is a black sheep in the company of Russian Jewish oligarchs as
he keeps his foothold in Moscow and does not fight Putin, as
Nevzlin and Berezovsky do. And he wants to save Israel, as he
said in TV interview. God knows, Israel needs somebody to save
her from her own deprivation.
An unlikely saviour, a leader of dispossessed in
a white Cadillac? On the second thought, a poor man won't be
able to make himself heard. It is easier for a camel to squeeze
through a needle's eye, but who needs a squeezed camel? It is
harder for a rich man, but still possible. Wealth is not a major
and irredeemable fault in my book.
His decision to run for the mayor of Jerusalem
gives us a chance to try the One State model in One City. Our
good friends Noam Chomsky and Michael Neumann promote the Two
States' idea, while our friends on our side, Virginia Tilley,
Roger Tucker and others speak for One State – but probably no
one understands that this is not a theoretical question.
Jerusalem's population includes some 30 to 40 per cent
Palestinians who are entitled to vote in the city elections.
They are entitled, but they do not vote: they were told that
there will be Two States, and East Jerusalem will be a part of
Palestine. So they have waited for forty years, and meanwhile
Jerusalem has become less and less hospitable for them. The City
Hall carries on endless warfare against the Palestinians of
Jerusalem. They have a means of defence: to vote in the
municipal elections; but they do not use it, to great relief of
the Jewish extremists.
A few years ago, during the last elections, I
spoke to many prominent Jerusalemites about participating; but
nobody dared to break the mould. They did not believe that they
would be able to change the way of things and still hoped that
the PNA will lead them to freedom. Maybe now, as Mahmoud Abbas
has turned his coat and converted the PNA into a branch of
Israeli security, they will understand their error and vote en
masse. They can form a third of city council, while another
third will be formed by poor Sephardis and religious Jews.
With Gaydamak, they Palestinians have a chance
to cause cosmic change and win the city – not for themselves
only, but for themselves as well. He is not a revolutionary, he
is not even a radical, but this rather conservative man has a
positive idea of equality and fair play, a flair for business
and uncommon organisational ability. Being brought up in the
Soviet Union, he has no racist or religious prejudice. With him,
the Palestinians may retire the good-hearted Jeff Halter and
make redundant his Committee against House Demolitions. Without
him, they are doomed to suffer. Probably this man offers us the
best chance for a change, for a good life in One City, and this
chance may lead to One State. Let us not waste it!
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